Décembre

Samedi 1er décembre, 9h30
Cela doit forcément me travailler le bulbe. Mes contrées oniriques, ces derniers jours, se peuplent à chaque fois des gens du Nord y compris, pour cette nuit, d’Alice avec, pour décor, le château d’O. Rêves dont je n’ai accroché que quelques bribes, mais qui témoignent de mon appréhension de ce 23 décembre.

Hier soir, en compagnie de ma chère amie Katia, après projection du sympathique, mais pas transcendant de rire, Tanguy de Chatillez, tête-à-tête culinaire à la pizza Pino de Bellecour. Occasion d’exposer ma complexe position vis-à-vis du château. Reconnaissance d’un enrichissement intérieur et d’une ouverture culturelle vers des domaines que je n’aurais pu de moi-même aborder. Reconnaissance de la féerie des grandes vacances passées dans les châteaux successifs de Heïm Reconnaissance d’une tranche d’enfance merveilleuse (entre 7 et 11 ans) au château d’O, assombrie avec la mise en perspective des sordides accords financiers sous-tendant notre séjour (normaux certes, mais donnant lieu à une surenchère déplacée de la part du château) et du subtil travail de sape de Heïm et de ses acolytes féminins sur nos parents.
En racontant à Katia l’anecdote du Noël (1980 je crois) où mes parents, après avoir fait la route (150km) et prévu un réveillon à cinq dans la maison de Combles, je crois, ont vu leurs trois enfants refuser de les suivre, car préférant le Noël du château, j’ai été ému et en colère contre le jeu manipulateur constant de Heïm. L’idée de nous faire tourner un petit film où l’on déclamait des « Bon Noël papa-maman » révèle, pour le moins, du cynisme sans état d’âme. Je ne disculpe pas pour autant mes parents qui, incapables de gérer familialement leur couple, ont engendré bien des chagrins, mais il n’y avait pas chez eux de stratégie sous-jacente de conditionnement en vue d’obtenir, des êtres, pensées et comportements accomplis, en apparence, de leur propre volonté. Un peu, puisque la comparaison éclaire, paraît-il, les raisonnements embrouillés, à la manière, en moins systématique et avec beaucoup plus de subtilité et donc de fragilité, de l’hypnopédie du Meilleur des mondes. L’humour à répétition et le recours systématique aux mêmes schémas intellectuels valent bien l’enseignement par le sommeil.
La reconnaissance s’arrête là ! Pour la suite, le principe de l’apport réciproque à joué et j’estime avoir largement donné de ma personne, de mon temps et de mes connaissances (notamment juridiques) en contrepartie des conditions de vie proposées (assez peu épanouissantes). Primauté de l’intérêt général, pour lequel j’ai adopté un engagement jusqu’au boutiste via la perdition intérieure, dont les chemins conduisent tous vers Heïm. Majeur et vacciné, je n’ai à m’en prendre qu’à moi, mais je ne dois pas sacrifier ma lucidité pour autant.
Evidemment, hors de question que je fasse allusion à cet état d’âme lors du passage éclair. La catharsis façon Heïm me pue au nez et fait partie d’un univers fui par cet exil lyonnais. En outre, Heïm pratiquant, sans doute depuis des décennies, le discours à facettes avec mise en exergue changeante selon l’interlocuteur, j’en ai eu la démonstration avec l’affaire du Gâchis, je ne vais pas me priver de le dispenser de toute la subtilité nouvelle de mon positionnement (qu’il a peut-être deviné tout seul). Que l’affectif subsiste avec rencontres épisodiques, pourquoi pas, mais que cela ne voile pas les motivations profondes, que j’essaie par bribes de transmettre ici, de ma séparation de cet univers aujourd’hui réduit à sa portion congrue.


Lundi 10 décembre, 0h10
Une vie sentimentale à l’image du reflux maritime, et pourtant l’espoir m’anime à nouveau. Depuis mercredi dernier, amorce d’une histoire avec BB, femme de deux ans mon aînée et résidant dans le même immeuble que moi. Pour ce qui est de la proximité, l’idéal est atteint. Pour ce qui tient aux qualités humaines, je ne suis pas loin de le penser aussi. Pas d’enthousiasme prématuré, mais l’attachement a divers signes positifs.
Mon 8 décembre, alors qu’elle travaillait (infirmière aux urgences), lui était tout entier dédié.

Jeudi 13 décembre
Très belle tournure avec BB. Une semaine et un jour de fréquentation et j’ai l’impression d’une complicité bien ancrée. Au contraire d’une Elen, elle ne jure en rien avec l’idée que je me fais de la douceur féminine. Je nous crois vraiment fait pour vivre une histoire à pérenniser. Bien que mes impressions se soient précédemment effondrées le temps passant, je veux y croire de nouveau. L’alliance qu’elle a d’une silhouette agréable, d’un joli visage et d’un caractère doux et attentionné, m’incline à cet optimisme.
Finalement, pas de 23 décembre chez les gens du Nord : Heïm est hospitalisé, pour des risques de perte de vue, et le cœur n’y est plus. Au fond, même si la raison est regrettable (je lui ai envoyé un e-mail d’affection), je ne suis pas mécontent d’annuler ce déplacement pour une réunion qui n’aurait rimé à rien.
Demain après-midi, petite visite à Nadette, vers Givors. Son mariage s’est avéré un calvaire avec l’engoncé tyrannique. Le rougeaud pas finaud, qui me reste en mémoire, ne m’appréciait pas, semble-t-il. Je le comprends aisément.

Lundi 17 décembre, 23h10
Passage fructueux chez mon père. Mon évolution critique à l’égard des méthodes de Heïm l’a convaincu de me révéler sa stratégie tenue depuis près de quinze ans : entretenir l’impression d’un regard nostalgique et bienveillant sur Heïm L’objectif était double : ne pas me mettre dans une situation psychologique difficile, à l’égard de Heïm, en transmettant, durant des années, son positionnement positif, voire affectif, sur l’univers de Heïm et ses choix existentiels.

Bien joué, car Heïm est allé jusqu’à reprendre contact avec mon père. En fait, l’utilisation des mêmes armes manipulatrices que celles exploitées depuis si longtemps par Heïm m’a permis de le voir sous un jour plus contrasté. La plongée dans le passé révèle quelques actions pseudo-pédagogiques de Heïm aux relents aberrants qui ne visaient que son propre intérêt par l’emprise subtile sur les êtres.

Avec BB, d’intenses retrouvailles et une volonté de me rejoindre dans mon appétit coquin. Pas encore quinze jours de rencontre, mais une densité du rapport très encourageante.
Revu Aurore avec Karl, puis Marie-Pierre C. et son adorable G. de trois mois ce jour…

Samedi 30 décembre, vers 1h30
Les dernières heures de cette année 2001 qui ne nous aura pas offert l’Odyssée de l’espace, mais les abysses barbares. Si on la retient comme l’année d’entrée dans le XXIe siècle avec, pour une fois, conjonction entre la logique numérologique et les aléas historiques, elle se hisse aussi comme parangon des penchants les plus primaires de l’être humain. Pauvre monde englué pour longtemps encore dans ses travers toujours recommencés. La gorgone à deux têtes Bush-Laden n’obéit qu’à deux motivations : dominer et posséder. Du classique depuis les grottes cromagnonnes !
Pour moi, un plaisir infiniment plus sain m’attend ce soir : les retrouvailles avec ma BB, de retour de Nantes. Karl débarque aussi à Lyon, en vue du 31 à Chalon… Nous irons donc déguster quelques lyonnaiseries culinaires avant d’aller écouter Bonny au Club 30… le meilleur pour finir : dodo chez BB alors que Karl ronflera chez moi.

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